Il paraît qu’à la rentrée, les professeurs liront la lettre de Jean-Jaurès aux élèves. Pour les adolescents cette belle lettre va sans doute les toucher. Pour les plus jeunes, c’est au delà de leur monde. Institutrice, l’acceptation de la différence et l’apprentissage de la tolérance m’ont toujours semblé primordiaux et j’ai essayé de transmettre ces valeurs a des tout petits
Pendant ma carrière j’ai eu quelques classes maternelles, souvent des CP et parfois des classes de CP/CE. Alors la présentation de la différence et le tolérance, ce furent de petits instants bien courts et bien simples pour être la portée même des plus petits.
Trois thèmes de réflexion seulement:« ce n’est pas bon, ce n’est pas beau, ce n’est pas vrai »
Pour « ce n’est pas bon », il était facile de leur faire comprendre que si l’un n’aimait pas les épinards ou les carottes, son copain pouvait très bien les adorer. Et comme on s’apercevait de la quantité d’opinions et d'options dans la classe, on comprenait qu’il fallait changer « ce n’est pas bon » en « je n’aime pas ».
Pour « ce n’est pas beau, » je partais des dessins d’élèves car effectivement, Il y en avait toujours que certains trouvaient très beaux alors que d’autres d’autres les disaient ….très laids. Dans la deuxième étape, je montrais des œuvres d’art ancien, moderne sculptures ou peintures et la encore les jugements étaient très différents. Les enfants comprenaient eux mêmes qu’il valait mieux dire « moi je n’aime pas ».
Pour « ce n’est pas vrai » c’était plus difficile. Il fallait distinguer vérités et croyances. Il s’agissait d’un jeu dans la 1ère étape. Montrer un crayon rouge et affirmer qu’il etait bleu, ça les faisaient rire et dire « c’est pas vrai, maîtresse ». Je leur demandait de me dire des exemples, toujours pour rire.
Pour les croyances, aborder la religion n’étant pas de leur âge, je passais par le Père Noël. Au CP et plus grands, ils n’y croyaient plus mais je posais la question « si ta petite sœur y croit, as tu le droit de lui dire que ce n’est pas vrai? » et étape suivante « as tu le droit de te moquer d’elle? »
Alors on comprenait qu’il fallait respecter les croyances, ne pas se moquer, et on en arrivait au mot tolérance. Et je terminais toujours en disant « qu’apprendre à être tolérant était aussi important que d’apprendre à lire »
Des années plus tard, j’ai rencontré un jour un ancien élève qui m’a dit n’avoir jamais oublié 2 choses qui lui venaient de moi: « être tolérant et penser aux consequences de ses actes »( c’était mon autre marotte).
J’ai été très touché qu’un élève d’une quarantaine d’années se souvienne de son CE, et d’autant plus touchée que c’était un Marocain et qui avait particulièrement bien réussi.
J’ai voulu raconter cette histoire personnelle parce que je trouve qu’il n’est jamais trop tôt pour faire comprendre aux enfants ce qu’est la différence et la tolérance. Et que pour un enseignant, c’est son rôle et … un très beau rôle.