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Rose et bleu... souvenirs familiaux!

Je vais terminer cette suite de notes avec des exemples personnels qui étonneront sans doute les femmes des années 2010. 

En 1904 ma grand-mère maternelle se marie sans situation évidemment, avec un ouvrier carrier travaillant à la carrière paternelle avec ses 4 frères. A la maison la mère et une soeur servaient leurs hommes a table debout derrière eux et mangeaient … quand ils avaient terminé. Le lendemain de son mariage deux assiettes sur la table attendent mon grand père et ma grand-mère s’assied devant  lui qui ne sait que répéter «  Ben, Marie!» . Marie lui répond calmement que dorénavant,  "ils mangeront en face de l’autre,  ensemble!"

Et ce n’est pas tout, après la soupe, les hommes s’endormaient sur la table pour une petite sieste ( ils s’étaient levé au jour) et les femmes attendaient debout derrière eux qu’ils se réveillent pour leur servir la suite. Mon grand père s’endormit donc  mais au réveil la table était débarrassée et sa femme n’était plus là. « Dorénavant  lui dit-elle, tu feras la sieste quand tu auras fini ton repas ». Tout était dit et mon grand-père s’en tint là. Sous l’impulsion de ma grand mère, ils « réussirent » comme on disait , elle devint épicière et lui coiffeur , avec café attenant à l’épicerie. Et elle veillait à  l'égalité dans son couple.

 

1914, la guerre. Dans ma famille paternelle, mon grand-père part le premier jour, le 2 août, laissant sa femme et trois enfants 8, 5 et 2 ans. Petite ferme de polyculture, quelques terres,  2 vaches,  4 ou 5 chèvres quelques volaille et lapins. Ma grand-mère prend la ferme en main avec l’aide de mon père de huit ans. Ils font ensemble les semailles d’automne, mon père aux  mancherons de la charrue, ma grand-mère conduisant  les boeufs, pendant que la grande soeur garde le bébé au bout du champ. Et cela dure jusqu’au 15 juin 1919. Ma grand-mère, secondé par mon père qui a maintenant 13 ans, a assumé les responsabilités d’une ferme qui n’a pas périclité. Au retour de son mari, elle n’a nullement envie de reprendre une place subalterne. Alors, après discussions, il est admis que les décisions se prendront désormais en commun et que ma grand-mère sera responsable de la confection et de la commercialisation  de fromage de chèvres. Elle a toujours vendu au marché des fromages appréciés et s’est toujours dit ... femme indépendante.

Génération suivante : ma mère est institutrice et souhaite disposer librement de son salaire. Il ne faut pas oublier que la femme est éternellement mineure et sous la domination de son mari. Une possibilité lui est  offerte, sur un livret de caisse d’épargne ouvert a son nom figure la mention « femme recevant un salaire et en ayant la libre disposition avec l’autorisation de son mari » Tous deux signent. En 1941, mon père meurt, le livret de ma mère est bloqué, et elle doit payer des frais de succession pour en récupérer le montant. Elle n’a jamais digéré cette humiliation!

Pour ces femmes, il y aura un grande bonheur, une injustice réparée, le droit de vote enfin acquis aux femmes  le 23 mars 44! Je me souviens de la joie de ma mère partant pour son premier bureau de vote , carte d’électeur en main!. Ma génération était encore sensible a cette conquête. En 1952, ma meilleure amie attend avec impatience la date des élections municipales car à quelques jours près, elle risque de n’avoir pas 21 ans. Et je me rappelle sa fierté d'aller "faire son devoir de citoyenne"! La joie de ma mère, la fierté de ma copine, comme cela semble ridicule a nos petites filles qui, si souvent, ne voient pas l'utilité de voter. Les femmes de ma famille n’ont  jamais raté une élection, même dans leur grande vieillesse.

Voilà, c’est ainsi que, petit à petit, des femmes humbles et obscures, qui osaient s’affirmer ont réussi a conquérir peu à peu une place et des droits,  mais rien n’est jamais acquis . Actuellement, les extrémistes des 3 religions du Livre, religion jumelles et toujours en lutte, tentent, au nom de la morale, de restreindre  les droits que les femmes ont eu tant de mal à imposer. J’ai trouvé une citation de Simone de Beauvoir particulièrement de circonstance, me semble-t-il!

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